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Suspendue entre ciel et brume, je rêve inlassablement de cette ville improbable dont le reflet vacillant se mire dans l’ondulation perpétuelle d’un miroir aquatique.
Je rêve de ses aubes irisées bercées de clapotis, de ses crépuscules flamboyants et de cette confusion infinie entre l’air, le marbre, le feu et l’eau…
Je rêve de ses ruelles mystérieuses qui, la nuit venue, happent des envolées de mousseline lorsque, surgie de nulle part, une sarabande jaillit dans la frivolité de jupons courtisant les pavés luisants.
Au secret de ses palais millénaires j’entends la rumeur ténébreuse, les rires encanaillés et les soupirs ravis de fêtes galantes émaillées par quelque musique baroque .
Combien de fois ne suis-je revenue errer dans cette cité au point d’en avoir usé tous les détours sans jamais en épuiser le sortilège.
Mes pas ont résonné sur les dalles de ce « campiello » où gazouille une fontaine, mon ombre a parcouru toutes ces « fondamenta », gravi toutes ces marches aux pierres disjointes, franchi tous ces ponts posés comme autant d’accents circonflexes sur les canaux…
J’ai même croisé la silhouette furtive de Casanova entrant dans quelque « ridotti » clandestin et les ombres fastueuses de ces courtisanes flânant dans le « Traghetto del Buso »
C’était il y a quatre siècles
C’était hier,
C’est aujourd’hui
Et ce sera demain, encore …
Sa magie intemporelle est gravée dans le désir immémorial :
Celui de tous les possibles, celui de tous ces autres « moi » obscurs et lumineux à la fois,
Celui aussi de tous ces « autres toi » où tu demeures - ni tout à fait familier, ni parfaitement étranger-- en souvenirs, en présent et en futur.
Derrière nos masques empanachés, nous nous cherchons : humant des parfums, effleurant d’autres peaux satinées et, parfois même, nous égarant dans ces éblouissements où nous croyons un instant nous reconnaître !
Inexorablement nos pas se rejoignent et nos errances fusionnent par cette reconquête où nous nous exauçons l’un à l’autre dans notre Venise enfin retrouvée !
(Elise)
« Tout me conduit à toi, comme si tout ce qui existe- parfums, clarté, métaux - était de petits bateaux naviguant vers les îles, tes îles qui m'attendent.
(Pablo Neruda).
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